mardi 12 mars 2013

La pédagogie Freinet



La pédagogie Freinet


Célestin Freinet s’inscrit dans le mouvement de la pédagogie nouvelle. Les principes qui orientent son action sont le respect de l’individualité de l’élève et le respect de la communauté ; l’individu étant parti intégrante de la communauté et les deux formants un tout solidaire. C’est une pédagogie de la participation et de la coopération. Elle définit un nouveau rapport entre l’enseignant et son élève et entre les élèves eux-mêmes et promeut un usage différent du matériel pédagogique.

L’un des principes de la pédagogie se fonde sur l’idée de la non-dissociation de l’affectif et de l’intellectuel dans les apprentissages, auxquels les notions de plaisir et de réussites sont associées. Cette idée est proche de la psychologie fonctionnelle de Claparéde qui propose l’idée que toute adaptation procède par tâtonnements et ajustements successifs de type : « essais et erreurs ».

La méthode naturelle est complémentaire de celle du tâtonnement expérimental. Elle suppose de la part du maître l’organisation d’un milieu riche en outils et techniques.
Dans le champ de la pensée psychologique, l’idée de travail a un statut de grande tendance vitale, de pulsion essentielle, un peu à l’image de la libido sexuelle chez Freud.

Eléments historiques et biographiques :

Il avait achevé sa formation d’instituteur lorsque la première guerre mondiale se déclencha. Participant aux combats il y fut grièvement blessé en octobre 1917, dans les terribles combats du Chemin des Dames et dut passer un long moment de convalescence. Il sera reconnu mutilé de guerre à 70%.
Il s’inscrit dans la dynamique de ceux des anciens combattants qui dénoncent la guerre et contestent l’ordre établi.

Dés 1920 – 1921 ; il écrit dans « l’école émancipée », l’organe pédagogique de la fédération de l’enseignement depuis 1910, lieu d’expression de la composante révolutionnaire du jeune syndicalisme enseignant.

 Ce n’est qu’en 1921, qu’il put obtenir son premier poste. Ces blessures très sérieuses l’avaient privé d’un poumon. C’est par conséquent d’abord par nécessité pratique qu’il chercha les moyens pour travailler avec les élèves, sans pouvoir parler trop longtemps ou être contraint à supporter la poussière de la craie des tableaux noirs.

Freinet était par ailleurs imprégné des grandes idées de penseurs de « l’école nouvelle » et de « l’école moderne » tels que Dotterns, Cousinet, Claparède et Ferrière.

Une certitude l’animait, celle qu’il y a en chaque enfant des ressources qui le poussent à agir et une curiosité qui l’incite à vouloir apprendre, tendances qu’il s’agit de réveiller. C’est l’idée qu’il faut partir de ce qu’ils savent déjà.

De 1921 à 1928 il crée diverses techniques de travail scolaire qui marqueront son itinéraire et celui du mouvement qui porte son nom.

Il commence par permettre aux enfants d’exprimer leurs propres connaissances et sentiments dans des « textes libres » qu’il utilise ensuite comme matériel de travail non seulement pour l’écriture mais aussi pour ce qu’ils sont, c’est à dire l’expression d’une individualité ; de la communication avec les autres et du partage de connaissances. Pour faciliter tout cela il utilise l’imprimerie. Les textes sont ensuite rassemblés et le «  journal scolaire » est né.

Il se met à utiliser de plus en plus le milieu environnant comme source de connaissance pour les enfants.

D’autres enseignants s’intéressent à ce qu’il fait et des contacts s’établissent. Des échanges s’installent entre-eux et les premières « correspondances scolaires » voient le jour.

En 1927 le mouvement de « l’imprimerie à l’école » tient son premier congrès.

Un peu plus tard il demande sa mutation à Saint Paul de Vence. Il se retrouvera dans des conflits avec les personnalités éminentes de la communauté. Ce sera l’affaire de St Paul. Les autorités décident d’imposer un congé à Freinet pour sortir du conflit.

Il n’abandonne pas le combat pour l’école populaire, ainsi est née l’école de Vence en 1933, construite par Freinet et financée par sa famille et des amis. C’est un internat.

A la suite de la mise sur pied de la CEL (coopérative d’enseignement laïc) société d’édition dont le but est de publier le matériel nécessaire à l’école moderne, les supports pédagogiques sont largement diffusés :

-         La collection BT (bibliothèque de travail)
-         Le fichier scolaire coopératif,
-         Les fichiers de travail auto-correctifs,
-         La gerbe ( recueil de textes échangés par plusieurs classes),
-         Le matériel d’imprimerie,
-         La nouvelle revue du mouvement «  l’éducateur prolétarien » devenue depuis « l’éducateur ».

Lors de la déclaration de guerre de 1939, Freinet devient suspect par les autorités militaires puisqu’il a des contacts partout y compris en pays ennemis. L’éducateur prolétarien subit la censure. En 1940, il est interné par les autorités de Vichy parce qu’il est militant de gauche et soupçonné d’être sympathisant avec la résistance et à laquelle il parvient à se joindre en 1944.

En automne 1945, la vie reprend à l’école de Vence. Les activités de la CEL aussi.

(1949, film de Chanois «  l’école buissonnière » vient illustrer la naissance de la pédagogie Freinet).

1957 Création de FIMEN ( Fédération Internationale des mouvements d’écoles modernes.

Il s’est éteint en 1966.

Les finalités de l’approche :

En pédagogie Freinet la place de l’individu est particulière. Celui-ci est à la fois unique et participant à un groupe. Il possède ses intérêts propres, ses besoins particuliers. Il est riche en potentiel mais dépendant de l’éducation pour le développer. Il fait partie d’une société qui règne avec sa loi, mais qui tire sa richesse des individus qui la composent et de leur diversité. C’est pourquoi ni l’un ni l’autre n’a de primauté sur sa contrepartie. Ils sont étroitement solidaires et interdépendants.

Outre les besoins fondamentaux de conservation, de subsistance et de réalisation personnelle qui caractérisent tous les individus, la pédagogie Freinet inclut dans sa philosophie les besoins de chacun de s’exprimer, de communiquer, de coopérer, d’apprendre et de s’organiser.

S’exprimer et communiquer :

C’est par l’expression qu’un individu se découvre lui-même, prend conscience de ce qu’il est et de ce qu’il veut. Pour ce qui est de la libre expression, il faut remonter à J.B Lamarck, ce maître auquel Freinet ne cessait de rendre des hommages.

-         Pour cela, la pédagogie propose de nombreux supports à l’expression.

On ne s’exprime pas seulement pour soi, mais aussi parce que l’on vit en communauté. Il faut pouvoir communiquer. Expression et communication sont dépendantes l’une de l’autre.

-         Pour cela, la pédagogie propose des moyens de communication.

L’écriture pour elle-même, comme la lecture pour elle-même n’ont pas de réalité significative chez nous. L’ensemble s’appuie sur une démarche de tâtonnement expérimental.

Coopérer :

L’expression et la communication, ainsi que toutes structures qu’on met en place pour les développer sont facilitées par une organisation coopérative de la classe. La coopération est un choix social en ceci la pédagogie Freinet est engagée, elle s’oppose à la compétition.
L’appartenance présente et future à une communauté sociale et culturelle prime. L’enfant est vécu comme un sujet social.

Apprendre :

Dans toute situation naturelle d’apprentissage, en dehors de l’école on apprend tous par l’expérience.

On essaie, on tâtonne, on recommence plusieurs fois, on imite. Ce n’est généralement qu’une fois le tâtonnement démarré que les enseignements théoriques ou pratiques du maître prennent un sens pour l’élève. Un enseignement préalable n’aurait probablement pas eu de sens. En effet, il ne prend son sens et sa portée que dans le cours de l’expérimentation en situation réelle. Les enseignements doivent tomber en terrain fertile, lorsqu’ils sont attendus et désirés.

En pédagogie Freinet ce processus de tâtonnement expérimental est considéré comme universel.

Même dans une approche qui établit rigoureusement ce qu’il faut enseigner aux enfants, chacun fait l’apprentissage de ce qu’il veut bien, à l’heure qu’il a choisie. L’approche traditionnelle qui met en route une série de mesures, de stimulations, de récompenses ou de punitions méconnaît que la motivation qui met en œuvre les forces de celui qui apprend, c’est celle de l’individu lui-même.

Individualiser l’apprentissage :

Ce qui distingue davantage les individus, ce sont leurs différences de motivations, de besoins. Chacun n’aura par conséquent pas le même besoin d’assistance du maître. A ce propos, Freinet a crée une pratique et des outils qui rendent possible cette individualisation. Selon lui, dans une classe où l’enseignement est collectif, les « rapides » sont freinés et les « lents » sont remorqués ou bousculés.

Pour ce qui est de concilier l’idée des programmes scolaires avec une telle conception de l’apprentissage, il dit que le programme est l’affaire du maître et pas des enfants.

Organiser la vie dans la classe, c’est aménager le temps et les ressources en fonction des projets de recherche de connaissances et de développements d’habiletés que les enfants apportent. D’autre part, le maître étant un individu qui fait partie du groupe, de l’ensemble classe, rien ne l’empêche lui aussi d’apporter sa contribution aux présentations, d’enrichir le groupe de savoirs qu’il a ou des habiletés qu’il maîtrise.

S’organiser et s’autogérer :

L’enseignant n’est plus le seul organisateur. Nul groupe ne peut se passer d’établir des normes, des lois, des règles de vie. C’est au « conseil de classe » que se prennent les décisions. Comme le maître est le dépositaire de l’autorité que lui a confiée l’établissement, c’est à lui de déterminer quelle part il délègue au conseil de classe.

Pour ce qui est de l’évaluation, des bilans de semaine ou de quinzaine sont instaurés. Les enfants sont appelés à donner leur point de vue ainsi que le groupe.